Par Delphine Klopfenstein Broggini, conseillère nationale. Ce texte est paru le 5 mai 2020 dans son blog du journal Le Temps. 

L’ambiance est aseptisée et les échanges contrôlés par la distanciation physique. Toutefois, malgré les milliers de mètres cubes du Bern EXPO, le Parlement aura probablement manqué d’oxygène ou simplement d’air pur. Après un débat fleuve sur le budget, le Conseil national, en apnée peut-être, débloque une enveloppe de 1,8 milliard en faveur des compagnies d’aviation. Le lendemain, il remet une couche et vote un surplus de 600 millions pour le secteur aéroportuaire actif au sol. Définitivement, le Parlement s’est pris une cuite au kérosène et le climat accusera le coup !

En Autriche, le gouvernement a accepté un soutien au secteur aéronautique mais le conditionne à des mesures climatiques fortes, notamment en pointant en premier lieu les vols court-courriers. Ce même pays, quelques années avant rachetait d’ailleurs la flotte de trains de nuit allemands, développant ainsi avec succès un marché dans le nord de l’Europe. Il a certainement construit le terrain lui permettant d’entamer sa reconversion vers des transports plus écologiques. La France, de son côté, a aussi demandé des garanties écologiques.

Mais le terrain est loin d’être conquis. De nombreuses liaisons ferroviaires, notamment pour le sud de l’Europe, en direction de Barcelone ou de Rome, mais aussi Copenhague ou Bruxelles ont disparu. La Suisse, ce petit pays au cœur de l’Europe et à la pointe mondiale en matière ferroviaire, a pourtant une carte à jouer ! Elle a même un boulevard, mais elle n’a pas su saisir l’occasion ce matin au Conseil national. Elle pouvait entamer sa nécessaire reconversion, et rediriger son soutien vers un secteur durable de transport. A terme, l’ivresse du Parlement coûtera cher au climat.