Par Marjorie de Chastonay, députée. Ce texte est paru dans le Courrier des lecteurs du journal la Tribune de Genève le 16 juillet 2020.

Ils ont osé ! Quelle honte ! Au-delà de la misère sociale et de la solidarité hors normes qui ont été mises en lumière lors de la distribution alimentaire qui a eu lieu ce printemps, le Grand Conseil avait enfin voté en urgence, fin juin, une indemnisation financière UNIQUE pour les plus précaires. Non, l’objectif de ce projet de loi du Conseil d’Etat (12723) sur l’indemnisation pour perte de revenus liée aux mesures de lutte contre le Coronavirus, n’était pas de soutenir le marché noir. Ici, il s’agissait bel et bien de faire preuve de solidarité face à une réalité existante et à une économie genevoise qui fonctionne ainsi et qui a sombré lors des mesures de confinement. 

La diversité des personnes concernées est cependant à mettre en exergue face aux préjugés persistants. En effet, qu’il s’agisse de personnes qui n’ont jamais demandé de l’aide aux services sociaux ni même aux associations d’entraide, tout comme celles qui bénéficient déjà de l’aide sociale, ou encore des personnes qui travaillent dans l’économie domestique, la restauration, sur les chantiers, dans la culture, les remplacements ou dans la livraison, indépendant.e.s, auxiliaires ou bien intérimaires, ces personnes précaires ont souffert et souffrent encore. Parmi ces gens, il y a des sans-papiers, mais ils et elles ne constituaient pas la majorité des personnes faisant la queue aux Vernets. Ils et elles étaient de l’ordre de 20 à 30%. Si le référendum aboutit, il y aura une votation populaire. Malheureusement, ce processus va stopper net le versement de cette indemnité et ces familles, car elles sont aussi nombreuses, devront attendre encore plus longtemps que tous les autres secteurs économiques qui ont pu bénéficier de mesures urgentes. 

Le point focal du blocage est le marché noir, communément pratiqué à Genève. Or, pendant la période du confinement, pas une seule fois, un Conseiller d’Etat n’a rappelé à l’ordre les employeur.euses quant à leurs devoirs et obligations face à leur personnel. Cela a été fait plus tard. Cette semaine, c’est le comité référendaire « Contre le travail illégal », lancé par l’UDC et le MCG, qui le dénonce mais qui joue ainsi à stopper l’aide directe aux plus démuni.e.s. J’étais fière de notre Grand Conseil qui avait enfin voté avec courage une indemnisation unique pour les salarié.e.s précarisé.e.s. Et la honte est revenue en plein été. Le référendum a été lancé et je trouve cela vraiment lâche et indigne d’une Genève ouverte, solidaire et internationale. Aujourd’hui, sous prétexte de lutter contre le marché noir, en sanctionnant les plus précaires, on ne touchera pas les employeurs.euses mais on enfoncera encore plus dans la pauvreté toute une frange de la population qui a faim…à Genève, en Suisse. »