Alessandra Oriolo

Résolution déposée par Alessandra Oriolo en mars 2021

Texte complet: R 955

Exposé des motifs:

La santé mentale de la population en ces temps de restrictions sanitaires
causées par la pandémie du COVID-19 est une préoccupation partagée par
toutes et tous. La durée des restrictions mises en place a un effet délétère sur
une partie de plus en plus importante de la population. Si toutes les mesures
mises en place pour enrayer la pandémie pèsent sur le moral de la population,
la diminution drastique des interactions sociales est peut-être la mesure qui
affecte le plus durement les personnes. Cependant, l’impact de cette
diminution des contacts est ressenti différemment selon les âges. Les
adolescent.e.s et les jeunes adultes, dont la construction de soi passe par les
échanges et les interactions sociales, sont ainsi touché.e.s de manière
prépondérante par ces mesures. Si la plupart d’entre eux/elles comprennent
parfaitement la nécessité d’appliquer les mesures sanitaires dans une logique
de solidarité intergénérationnelle, de prévenir la saturation du système
sanitaire et des risques encourus par cette maladie, il ne faut pas que ces
mesures se fassent à leur détriment et occultent tous les autres risques. Que ce
soit sur le plan psychique, physique ou économique, il est à craindre que plus
les restrictions durent, plus les séquelles sur les jeunes soient importantes. Il
est extrêmement important que les autorités politiques soient interpellées sur
cet aspect de la crise sanitaire, afin qu’elles le prennent en compte dans leurs
décisions.

Si les moins de 16 ans ont la chance de pouvoir suivre l’école en
présentiel et que des assouplissements pour les activités sportives et
culturelles des moins de 20 ans ont déjà été annoncés le mercredi 24 février
dernier, jusqu’ici rien n’a été proposé pour les 19-25 ans. Or eux/elles aussi
sont très dépendant.e.s des dynamiques de groupe pour leur équilibre
psychique et afin de retrouver un élan positif.

Les jeunes adultes (19-25 ans) sont particulièrement vulnérables à
l’absence de contacts sociaux. C’est l’âge d’apparition de la plupart des
maladies psychiques et l’isolement en est l’un des principaux facteurs de
risque. Pour les groupes à risque, c’est même le facteur principal du taux de
conversion vers la psychose. Dans l’étude effectuée cet automne à
l’Université de Genève, le manque de socialisation, l’isolement et les cours
en ligne ont été identifiés comme les principales sources du mal-être étudiant.

Il est de notre responsabilité de politicien.ne.s de considérer ce risque
majeur que nous faisons courir à une partie de notre population, pour en
protéger une autre. Lors de la promulgation des restrictions sanitaires, nous
devons tenir compte de la différence des publics cibles auxquelles elles
s’adressent. En effet, ce n’est pas la même chose d’être en télétravail à 40 ans
qu’à 20 ans. A 40 ans, votre carrière est lancée, vos groupes d’ami.e.s sont
définis et vos choix familiaux sont déjà bien avancés. L’isolement à ce
moment de la vie est, certes, très pénible, mais il a, a priori, moins d’impact
sur votre développement. En revanche, à 20 ans, on est encore largement
dépendant de son entourage pour sa construction identitaire et
professionnelle. On a un besoin prépondérant de s’identifier à des figures
tutélaires portantes, comme les professeur.e.s ou les maître.sse.s de stage.
On a besoin de se rêver dans un avenir possible, de pouvoir se tester, se
confronter et explorer des potentialités, surtout quand sa capacité économique
est faible. Celle-ci s’est, par ailleurs, encore réduite face à l’absence de
perspective d’emplois à court, moyen voire long terme. Les étudiantꞏeꞏs se
construisent donc généralement à travers l’appartenance à un groupe et grâce
aux interactions offertes par de nouvelles rencontres. Les cours en ligne et
l’annulation de pratiquement toute possibilité de rencontre les privent donc
de leurs principales ressources. Et ceci depuis plus d’un an. Il y a urgence !

Cette résolution demande à l’Assemblée fédérale de prendre des mesures
ciblées et cadrées afin de tenir compte de la situation particulière des
étudiant.e.s, tout en appliquant les besoins de contrôle liés à la pandémie.
Permettre la reprise des cours en présentiel pour tou.te.s les étudiant.e.s des
hautes écoles suisses4 dès le 12 avril 2021, et ce quelle que soit l’évolution de
la pandémie, nous semble essentiel et nécessaire. Pour ce faire, des plans
sanitaires stricts seront élaborés par les différentes institutions. Des solutions,
telles que la division en deux groupes pour réduire les jauges dans les
auditoires ou des semaines d’alternance, sont complètement envisageables
pour permettre une saine et sereine reprise progressive des cours en
présentiel.
Il est également important de souligner que l’enseignement en présentiel
est la forme d’enseignement principale des hautes écoles. Les priver de cela
depuis plus d’une année met en péril le cursus de formation des étudiant.e.s
des hautes écoles. Si, en mars 2020, des cours à distance ont rapidement pu
être mis sur pied et que cela a plutôt bien fonctionné sur le court terme, aujourd’hui, c’est la qualité de l’enseignement et la santé mentale des
étudiant.e.s qui est menacée.

Le 18 février 2021, Swissuniversities a déposé une prise de position5
alertant sur la nécessité de la reprise des cours en présentiel pour assurer un
enseignement de qualité. Cette résolution partage les demandes de
Swissuniversities et leur offre l’appui du Grand Conseil de Genève, tout en
espérant que les cantons universitaires viennent eux aussi rejoindre le canton
de Genève.