Par Jean-Michel Bugnion, député

Le MCG et EàG, suivi par le PS, avaient fait alliance avant cette session des 21 et 22 avril. L’objectif était de parvenir à faire présenter par le Conseil d’Etat un budget 2016, socialement à gauche et pro fonctionnaires. Pour atteindre la majorité, ils avaient besoin des voix vertes et nous ont demandé de rejoindre cette « nouvelle alliance ».

Seulement voilà, faire alliance avec deux partis, aussi versatiles et instables, profiter de l’opportunité pour passer en force des mesures sociales, particulièrement en faveur des fonctionnaires, ne nous a pas convaincus. Le risque était trop grand de voir l’un ou l’autre se désister à la première occasion, d’avoir un retour de boomerang revanchard de la droite ou de créer un conflit ouvert public-privé, celui-ci dénonçant à la population le traitement de faveur accordé à celui-là. Si la politique doit servir le bien commun, il nous est apparu qu’à l’évidence, ce n’était pas ici le cas. Nous avons donc conditionné notre appui, sans pour autant rejoindre l’alliance, et avons ainsi été décisifs à plusieurs reprises.

Voyons d’abord les deux objets sur lesquels notre soutien conditionnel au triptyque MCG-EàG-PS a porté ses fruits.

La résolution R 807 : « pour rétablir un dialogue constructif entre partenaires sociaux et garantir les meilleures prestations à l’ensemble de la population ». A l’origine, cette résolution, déposée par un membre d’EàG, Jean Batou, comportait plusieurs invites, dont la plupart nous paraissaient excessives ou non pertinentes. Comme nous l’avions demandé, elle a été ramenée à une seule invite, que nous partageons pleinement : renoncer à la réduction linéaire de 1% des charges de personnel et des subventions. Succès au vote : pour l’ajout 48 oui – 43 non ; pour l’urgence 50 oui – 42 non ; pour l’acceptation 48 oui – 41 non. A noter toutefois qu’il ne s’agit que d’une résolution, que le Conseil d’Etat peut parfaitement ignorer !

La motion M 2317 : « intensifier la lutte contre la fraude fiscale pour accroître les finances de l’Etat et maintenir les prestations à la population ». Notre soutien conditionnel a amené la reformulation du texte pour le rendre plus concret et mieux ciblé. La demande est que l’Etat engage 5 nouveaux contrôleurs fiscaux, de manière à pouvoir traiter à fond les gros dossiers, souvent complexes et chronophages, parfois superficiellement analysés aujourd’hui par manque de moyens. A nouveau, succès : le renvoi directement au Conseil d’Etat a été voté par 57 oui, 31 non et 1 abstention.

Nous nous sommes davantage distanciés de la nouvelle alliance sur d’autres points.

Le PL 11622-B : « rapport de la commission de la santé chargée d’étudier le projet de loi du Conseil d’Etat modifiant la loi sur les établissements publics médicaux ». Après l’absorption par les HUG des cliniques de Joli-Mont et de Montana se posait la question du maintien ou non d’un conseil d’administration pour ces organismes ; contrairement à l’avis du PS, du MCG et d’EàG, nous avons opté pour sa suppression, rejoignant ainsi le vote de la droite, persuadés que son action n’avait pas été, et ne serait pas, décisive et que l’économie réalisée se justifiait (oui 50 – non 45). De même, nous avons soutenu l’amendement du PLR Pierre Conne qui demandait l’évaluation de l’entier du système HUG, contre l’avis du magistrat à leur tête, M. Poggia (50 contre 45).

Le PL 11837-A. « rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand-Conseil chargée d’étudier le projet de loi du Conseil d’Etat modifiant la loi sur la Feuille d’Avis officielle de la République et canton de Genève ». Même cas de figure, nous avons rejoint le vote de la droite pour accepter ce PL, même si à la clé il y a la suppression de 15 postes de travail dans une imprimerie. Il faut quand même préciser que la FAO, devenue gratuite, est diffusée sous forme électronique. Quelle imprimerie continuerait à payer des employés pour imprimer un journal gratuit, disponible sur le Net ? Les 15 postes étaient donc condamnés, ce n’est pas ce PL qui en est la cause, mais bien plutôt la gratuité acceptée de ce média.

Enfin, en solo, nous déplorons une défaite et fêtons une victoire.

PL 11688-A : « rapport de la commission de l’économie chargée d’étudier le projet de loi du Conseil d’Etat sur l’action publique en vue d’un développement durable (Agenda 21) ». Le canton de Genève était le premier à se doter d’une loi sur le développement durable ; il est hélas le premier à la perdre au 31.12.2015, pour ne pas l’avoir prorogée ! A l’évidence, notre exécutif ne lui porte aucun intérêt, de même que la majorité du Grand-Conseil qui a refusé l’urgence de traitement que demandait Boris Calame au nom des Verts.

R 808 : « résolution du Grand-Conseil genevois au Conseil fédéral pour la sauvegarde de la recherche agronomique en Suisse ». Par communiqué du 6 avril 2016, la Berne fédérale supprime d’un trait de plumes 4 instituts et 19 divisions de recherche agronomiques, congédiant 14 chercheurs réputés. Cette brutale restructuration à l’américaine, motivée par le sempiternel souci d’économiser, va entraîner des dommages conséquents, tant pour l’agriculture que pour la sécurité et la souveraineté alimentaires du pays. François Lefort a rédigé cette résolution qui a frisé l’unanimité : 80 oui, 1 non.