[M] Bois de Versoix – le premier parc naturel périurbain à Genève
Angèle-Marie Habiyakare
Motion déposée par Angèle-Marie Habiyakare en octobre 2023
Texte complet: M 2962
Exposé de la question:
Les parcs d’importance nationale
La Confédération soutient la création et le fonctionnement de parcs suisses depuis le 1er décembre 2007. Les communes sur le territoire desquelles se trouvent ces parcs s’efforcent, avec la population et les cantons, de conserver ce patrimoine. Elles s’attachent aussi à l’accroître et à en faire une utilisation durable afin de contribuer au développement économique et social de leur région.
Les parcs suisses offrent des avantages écologiques, économiques et sociaux à la population, et, par ailleurs, les visiteurs, les cantons et la Confédération profitent eux aussi des prestations fournies par les parcs. Les paysages caractéristiques ont un effet bénéfique sur la santé physique et morale des personnes. Et les parcs contribuent à la Stratégie Biodiversité de la Confédération puisqu’ils favorisent la diversité de la faune, de la flore et de leurs habitats. Outre le Parc national suisse, il existe trois catégories de parcs : les parcs nationaux, les parcs naturels régionaux et les parcs naturels périurbains.
Cette dernière catégorie concerne des territoires situés à proximité d’une région fortement urbanisée qui offrent à la faune et à la flore indigènes des milieux naturels intacts dans leur zone centrale. Celle-ci est entourée d’une zone de transition qui sert de tampon et qui offre des possibilités variées d’éducation, de découverte et de détente, ce qui contribue grandement à améliorer la qualité de vie de la population urbaine. Si les conditions pour créer un parc sont remplies, le label « Parc » est attribué par l’OFEV, et vise à mettre en œuvre les mesures nécessaires pour
atteindre les objectifs fixés dans une charte. La charte a une validité d’au moins dix ans ; elle comprend un contrat de parc et un plan de gestion, complétés par une planification sur quatre ans.
L’OFEV soutient les parcs d’importance nationale, notamment par des aides financières et une reconnaissance du statut. Dans le cadre de sa politique des parcs, la Confédération, en association avec les organes responsables, les cantons concernés et les institutions d’encouragement de la recherche, assure la coordination de la recherche sur les parcs ainsi que la coopération et les transferts de connaissances à la fois entre les parcs suisses et avec des parcs étrangers.
Les bois de Versoix
Les bois de Versoix s’étendent sur une surface totale de 553 ha. Actuellement, ce sont 113 ha, répartis en 5 blocs distincts, qui sont classés en réserve naturelle, principalement autour des zones humides. Une population importante de cerfs y est établie. Leurs déplacements y sont souvent contraints par les grandes infrastructures qui bordent ces bois (p. ex. l’autoroute). La proposition vise à relier les réserves naturelles existantes en délimitant de nouvelles réserves naturelles, et à créer ainsi le noyau central d’un parc naturel périurbain qui comprendrait l’ensemble des surfaces boisées dans lesquelles s’écoulent la Versoix et ses affluents (le Creuson et La Fontaine de Pissevache notamment). La création d’un tel parc pourrait accompagner le Plan directeur forestier, actuellement en consultation.
Si le territoire genevois, de par son positionnement géographique, son exiguïté et les prestations demandées à la forêt, ne se prête guère à la délimitation de grands parcs naturels, les bois de Versoix et ses 553 ha représentent un potentiel intéressant. Par rapport à d’autres surfaces boisées importantes du canton, les bois de Versoix se distinguent par la présence d’une rivière d’importance cantonale, classée par le WWF parmi les cours d’eau les plus naturels et les plus précieux de Suisse. Il paraît important de souligner qu’une surface minimale de 100 ha en un bloc est nécessaire pour qu’une réserve naturelle déploie tous ses effets en matière de dynamiques naturelles.
Sur les plus petites surfaces, la définition de réserves à gestion dirigée permet seulement une certaine valorisation des potentiels de biodiversité dans des lieux choisis. En accédant au statut de parc naturel périurbain, l’ensemble des bois de Versoix bénéficierait d’une gestion très pointue pour assurer leur mise en valeur biologique. A Versoix, la forêt est considérée comme vieille
lorsqu’elle atteint entre 140 et 200 ans. Passé ce stade, les arbres sont coupés. Même si des efforts sont fournis pour laisser le bois mort sur place et certains arbres « non rentables » car abîmés sont laissés sous la dénomination d’« arbres habitats », il paraît nécessaire d’en faire plus. Une forêt s’enrichit à mesure qu’elle vieillit si on la laisse se développer naturellement, tout en
présentant une meilleure résilience. Une forêt atteint son potentiel maximum, en matière de service écosystémique (notamment concernant la biodiversité), lorsqu’elle atteint environ 800 ans. Ce sont les arbres âgés et sénescents qui accueillent jusqu’à 30% de la biodiversité. A ce stade, la forêt se rapproche du stade de la forêt primitive ou naturelle. Il y a donc une énorme marge de
progression pour la forêt de Versoix.
La création d’un parc naturel périurbain dans la forêt de Versoix
permettrait également de faire appel à la recherche scientifique pour étudier plus précisément l’évolution naturelle de la forêt en plaine. Il s’agira d’étudier les effets de l’ancienneté de la forêt sur le nombre d’espèces et les services écosystémiques qui se mettent en place. En termes didactiques, cela permettrait de renforcer la sensibilisation du public et des écoles à l’évolution et au maintien de la forêt naturelle. A titre d’exemple, le canton de Vaud a agi sur les bois du Jorat en le constituant en parc naturel périurbain. La Ville de Lausanne a justifié cette démarche par les opportunités suivantes qu’offrait un parc naturel périurbain :
– Sensibiliser différents publics aux valeurs naturelles et patrimoniales du Jorat.
– Soutenir une exploitation forestière respectueuse de la nature (hors zone centrale) et faciliter la promotion de la filière du bois à l’échelle régionale.
– Accompagner les activités des visiteurs et maîtriser de manière concertée les pressions grandissantes qui s’exercent sur le territoire.
– Répondre aux objectifs définis dans différentes politiques qui touchent à la préservation des forêts vaudoises tout en bénéficiant du soutien financier de la Confédération, du canton et de tiers, ainsi que d’une structure organisationnelle, pour développer des projets.
– Augmenter la biodiversité forestière, en particulier les espèces liées au bois mort, aux milieux humides et aux sources.
– Renforcer la connaissance du Jorat grâce à la recherche scientifique appliquée.