Plus de 7000 personnes ont pris part à la Marche pour le climat 2018 ce samedi, organisée par près d’une vingtaine d’organisations de la société civile, avec le soutien de l’Alliance climatique suisse.

Suite à la publication du rapport spécial du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), le 8 octobre dernier, le message de la marche est d’exiger un sursaut salutaire dans la passivité affichée par les autorités politiques face à la crise climatique. La marche se veut notamment être un signal adressé aux parlementaires en vue des prochaines discussions sur la loi CO2. Publié le 8 octobre dernier, le 5ème rapport du GIEC affirme clairement que, face à l’urgence climatique, essayer de maintenir le Statu quo n’est pas une option. Tous les secteurs doivent contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique. Les concentrations de CO2 dans l’atmosphère n’ont jamais été aussi élevées depuis 800’000 ans. Des modifications profondes des systèmes naturels et humains sont déjà en cours. Il reste une petite fenêtre d’opportunité pour agir et limiter le réchauffement climatique à 1.5°C, comme s’y est engagé la Suisse en signant l’Accord de Paris en 2015. Pourtant, la politique climatique de la Confédération ne suit pas cet objectif. L’exemple de la mobilité est particulièrement significatif du retard pris par la Suisse. Alors que ce secteur est le principal émetteur de CO2, la Confédération préfère acheter des compensations à l’étranger plutôt que prendre de vraies mesures pour diminuer les émissions à l’intérieur du pays. « C’est complètement aberrant », déclare Yvonne Winteler, de l’Association Climat Genève. « A la place de protéger le climat, la Confédération protège le secteur de l’automobile et de l’aviation, sans tenir compte des impacts pour les prochaines générations ».

Les manifestants dénoncent aussi le soutien apporté par le secteur financier suisse aux énergies fossiles. Les activités des banques, des assurances, des fonds de pension et même de la Banque nationale suisse ont un impact équivalent à 20 fois les émissions domestiques de la Suisse. Certaines banques, comme Crédit Suisse soutiennent les pires projets de développement des énergies fossiles, comme les hydrocarbures de schiste, le charbon ou les sables bitumineux. « Alors que l’humanité devrait tout faire pour sortir rapidement de sa dépendance aux énergies fossiles, ce soutien est le signe d’un aveuglement particulièrement dangereux pour le climat, mais aussi pour les clients de ces institutions », explique Christian Lüthi, de l’Alliance climatique suisse. « Le secteur financier vit encore au vingtième siècle et ferait bien de remettre ses pendules à l’heure s’il ne veut pas être rattrapé par la bulle carbone. »

Un autre aspect abordé par les manifestants c’est le poids pris par le secteur agro-alimentaire dans le réchauffement climatique. A lui seul, le secteur de l’élevage émet autant de CO2 que tous les transports à l’échelle mondiale. Pour les manifestants, il est impératif de promouvoir une alimentation qui permette de protéger efficacement le climat et la biodiversité, en favorisant les aliments végétaux et une agriculture de proximité respectueuse de l’environnement. « Une telle évolution est doublement salutaire », argumente Mathias Schlegel, de Greenpeace Suisse. « Se distancer des produits d’origine animale permet de protéger le climat, mais aussi d’améliorer la santé des Suisses à l’heure ou la population s’inquiète de l’explosion des coûts de la santé. »

Alors que la Confédération espère faire passer une politique climatique basée sur l’achat de permis de polluer à l’étranger, une délégation de représentants des pays du Sud a pris part à la marche afin de rappeler le décalage existant entre les pays les plus riches, qui contribuent le plus au réchauffement, et les régions les plus pauvres, qui subissent les pires effets de la crise climatique. « Le réchauffement climatique affecte de manière disproportionnée les populations et les communautés qui ont le moins contribué à créer cette urgence planétaire », déclare Nathalie Rengifo de Global Campaign to Reclaim Peoples Sovereignty, Dismantle Corporate Power and Stop Impunity. Elle ajoute: « Les sociétés transnationales sont à l’origine de cette crise. Le pouvoir doit revenir aux citoyens, pas aux entreprises. »

Les participants à la marche expriment ainsi leur volonté de voir mises en œuvre des politiques climatiques ambitieuses de la part des pays les plus développés, afin de préserver les chances de milliards de personnes d’accéder à un niveau de vie décent.