Cher-e-s ami-e-s,

Il y a six mois, en novembre 2014, le « groupe d’expert intergouvernemental sur l’évolution du climat » , le GIEC, publiait son cinquième rapport. Ce rapport contient une très mauvaise et une bonne nouvelle, la très mauvaise c’est que le réchauffement du climat s’accélère avec des impacts graves et étendues sur la santé, la biodiversité, la sécurité alimentaire et la sécurité tout court et qu’aujourd’hui il n’est pas certain que nous réussissions à maintenir la hausse globale des températures sous le seuil de 2°C. La bonne nouvelle c’est que nous avons encore les moyens de limiter le changement climatique. « Tout ce dont nous avons besoin, déclarait début novembre le vice-président du GIEC, c’est de la volonté de changer. » Pour garder le cap des 2°C, les émissions mondiales de gaz à effet de serre doivent être réduites de 40 à 70 % entre 2010 et 2050. Cela implique, entre autres, de se détourner massivement des énergies fossiles, d’améliorer fortement l’efficacité énergétique, de limiter la déforestation et donc d’investir des centaines de milliards d’ici 2030.

Or, à Berne, comme à Genève, Parlements et Gouvernemens n’ont pas pris conscience de l’urgence et se voilent la face. Ils continuent à être prêts à investir des milliards dans des projets qui contribuent à augmenter les émissions de gaz à effet de serre, que ce soit par exemple pour un deuxième tube routier à travers le Gothard, pour le développement de l’aéroport de Genève ou pour une traversée de la rade, alors qu’en même temps ils évoquent l’absence de moyens financiers suffisants pour développer plus rapidement les transports publics ou s’engager plus résolument dans la transition énergétique.

Hier, le gouvernement genevois, par la voix de son Président s’est adressé aux nouveaux membres des exécutifs des 45 communes genevoises qui prêtaient serment à la veille d’une nouvelle législature. Cela aurait pu être une occasion en or pour sensibiliser les nouveaux magistrats aux conséquences du réchauffement climatique et les inciter à investir dans l’amélioration de l’efficience énergétique des bâtiments communaux, dans le développement des énergies renouvelables, dans des mesures d’économies d’énergie, dans le développement de pistes cyclables, dans des mesures d’incitation  à privilégier les transports publics, etc, bref, l’opportnité de souligner que la transition énergétique s’opère à tous les échelons et que l’échelon communal est déterminant. Plusieurs communes suburbaines dont la mienne s’apprêtent ou sont en train de construire de nouveaux quartiers. Aucun mot d’encouragement ou de soutien n’a été prononcé de la part du gouvernement pour insister  sur la nécessité que ces nouveaux quartiers soient véritablement des écoquartiers exemplaires qui relèvent durablement les défis climatiques auxquels la planète est confrontée.

Comme de toute évidence la prise de conscience nécessaire n’a pas encore atteint les sphères gouvernementales et parlementaires, des rassemblements comme celui d’aujourd’hui sont plus que jamais nécessaires. La société civile doit devenir un puissant lobby qui mette le climat définitivement à l’agenda politique. Mais les manifestations ne suffisent pas. Il nous faut imaginer, inventer, créer les alternatives. Les nouveaux quartiers en construction doivent devenir des lieux privilégiés de ces innovations nécessaires. A  Meyrin, de nombreuses personnes s’y engagent au sein du futur écoquartier des Vergers. Ce n’est pas toujours simple. Elles se heurtent souvent à des résistances et des incompréhensions. Mais il est indispensable de persévérer. Alternatiba Léman auquel les autorités meyrinoises ont décidé d’apporter un soutien financier permettra de rendre visible et crédible que d’autres manières de produire et de consommer sont possibles. Je souhaite vraiment que ce vaste rassemblement en septembre prochain contribue à cette indispensable prise de conscience.

Et pour conclure, j’évoquerai également le débat qui s’engage sur l’avenir de l’aéroport de Genève. L’aéroport de Genève n’est certes pas le seul responsable des nuisances et de la pollution que nous subissons, mais la discussion autour de son développement futur lance un vrai débat de société. Consciente des conséquences néfastes sur la santé des habitants, sur la création de logements qu’implique un futur développement de l’aéroport, les communes riveraines, dont Meyrin, s’inquiètent et s’organisent. Pétitions, résolutions et initiatives sont lancées. En lien et en accord avec l’Association transfrontalières des communes riveraines de l’aéroport, la commune de Meyrin demande de surseoir à l’élaboration d’une planification qui ne remette pas en question le développement prévu de l’aéroport. Nous demandons entre autres que préalablement à toute décision des études soient faites sur la santé et la mobilité des populations riveraines. Ces études doivent nous permettre d’opérer des choix en pleine connaissance de cause. L’avenir de l’aéoroport international de Genève doit interpeller la société dans son ensemble. Au cours de la dernière décennie, comme le relève l’étude réalisée par Noé 21, l’aéroport a connu une énorme croissance avec une augmentation de plus de 80% d’émissions de CO2 et donc plus de nuisances environnementales, mais aussi une croissance de 80% de passagers profitant des vols low cost en plein essor. Le débat qui s’engage autour de l’aéroport, le frein que nous devons absolument tirer si nous voulons agir sur le changement climatique implique aussi une remise en question de nos propres modes de déplacement.

Pierre-Alain Tschudi , Conseiller administratif à Meyrin, 30 mai 2015 manifestation pour le climat.