Comme il l’a si bien fait remarquer, il est plus facile d’être dans l’opposition que d’accepter ou encore de construire et de proposer. Il a regretté le cumul des oppositions au détriment de la construction d’une majorité. Le remède tient, selon lui, dans la convivialité et aux espaces que sont les plénières et les commissions rappelant qu’aucune politique ne se fait si les autres sont des adversaires. La politique se nourrit des moments conviviaux autour d’un verre.

Cinq ans après sa naturalisation, Diego Esteban a été nommé comme président du Grand Conseil, plus jeune président que le canton n’ait jamais connu. Preuve que les jeunes doivent investir le terrain politique.

Diego Esteban a fini en remerciant le bureau pour son fonctionnement harmonieux et collégial ainsi que le Sautier et tous les membres du secrétariat général pour leur travail quotidien. 

Est venu le tour de Caroline Marti, cheffe de groupe des Socialistes, de rendre hommage à son collègue. Elle a même entonné une chanson rappelant l’exploit de notre président, à savoir la capacité à faire chanter ses député-e-s au karaoké lors de la sortie des parlementaires. Chef d’orchestre des débats, il a su faire mentir les mauvaises langues qui le trouvait trop jeune et inexpérimenté. Il a prouvé qu’on peut être jeune et compétent, bosseur, motivé, déterminé et drôle.

Nous avons ensuite passé à l’élection du président en la personne de Jean-Luc Forni. Le nouveau président a remercié Diego Esteban. Le Parlement a ensuite élu Céline Zuber-Roy comme vice-présidente, Jocelyne Haller comme seconde vice-présidente. Ce fut le tour du nouveau bureau d’être élu avec la brillante élection de la non moins brillante Katia Leonelli mais également Alberto Velasco, Stéphane Florey et Christian Flury.

La première partie de séance s’est terminée ainsi et les membres du Parlement ont été invité à profiter d’un apéritif dinatoire. Au menu, poulet en sauce, crevettes et filets panés. A l’heure de l’urgence climatique et de l’effondrement de la biodiversité, le bureau du Grand Conseil devrait s’assurer que des alternatives végétariennes soient à disposition.

Une aide d’urgence pour le secteur culturel a été acceptée avec une très large majorité et la clause d’urgence. Cette aide permettra de couvrir les six premiers mois de l’année 2022 en apportant une aide financière pour les pertes dues aux restrictions mais également en aidant les projets de transformation des institutions ainsi que certaines bourses pour soutenir le secteur. Pour les Vert-e-s, Corinne Müller Sontag a rappelé que les aides ont largement démontré leur pertinence et leur efficience et à quel point elles avaient été décisives pour que les acteur-trice-s culturel-le-s surmontent la crise. Si la reprise est délicate, la vitalité du secteur est essentielle pour notre canton.

La motion « Pour une orientation rapide et efficace des primo-arrivants ukrainiens à Genève » a été renvoyé au Conseil d’Etat. Didier Bonny a rappelé qu’après le formidable élan de solidarité suite au déclenchement de la guerre en Ukraine et la mobilisation de la société civile, il est désormais temps que les bénévoles soient soutenus par des professionnels. Le bénévolat arrive à ses limites. C’est le cas du Welcome Center qui doit pouvoir compter sur le soutien de l’Etat. C’est aussi une nécessité pour que les personnes arrivant d’Ukraine ne tombent pas entre les mains de ceux qui voudraient en profiter.

La séance du 20 mai 2022 a tout d’abord été consacrée aux extraits et aux pétitions dont deux, « Non à l’agrandissement d’une base des Frères musulmans à Genève » et « Pour une rue des Eaux-Vives à taille humaine » s’opposaient à l’agrandissement du centre islamique. Lieu culturel, de culte, il accueille également des activités sociales comme les dons alimentaires. Le lieu connaît une fréquentation en hausse et nécessite une surélévation. 

Ce débat a été pour la droite l’occasion de faire une course à l’amalgame, aux préjugés et aux propos douteux. Notre députée Katia Leonelli a expliqué que sous couvert de raisons administratives, ces pétitions cachaient des raisons idéologiques. Ce projet est lié au droit des constructions et doit être traité à ce titre comme n’importe quel autre bâtiment. Si tel n’était pas le cas, il s’agirait d’un cas contraire à l’état de droit. Le Conseil d’Etat a confirmé qu’il n’existait aucun problème avec ce centre. Et que si problème il y avait, ce ne serait certainement pas lié à la taille du centre.

Les deux pétitions ont été déposé sur le bureau du Grand Conseil.

L’urgence « Pour la nomination d’un procureur général extraordinaire lors de circonstances particulières » a été acceptée. Celle-ci vise à éviter des conflits d’intérêts lorsqu’un magistrat du Ministère public est une partie plaignante ou fait l’objet d’une plainte pénale. Dans ce cas-là, le Conseil Supérieur de la Magistrature peut nommer un procureur extraordinaire. Une solution simple pour un problème qui soulève des questions complexes selon Dilara Bayrak. Elle rajoute que l’indépendance et l’impartialité des magistrats ne peut pas être garantie lorsqu’ils sont amenés à juger des collègues.

La reprise des points à l’ordre du jour a permis de traiter le sujet du thorium. L’occasion pour Pierre Eckert de citer Boris Vian « Y’a quelque chose qui cloche là-dedans, j’y retourne immédiatement ». Et en effet, face à l’impasse de la filière de l’uranium, les pro-nucléaires se rabattent sur la filière du thorium. Si ce dernier nous fait miroiter de belles promesses, il n’a en réalité pas progressé depuis les années 1960. Il est irréaliste d’imaginer avoir une centrale opérationnelle avant 2050 et la Suisse a d’ores et déjà choisi de sortir du nucléaire. Le thorium n’a rien à faire dans la stratégie énergétique de la Suisse. D’autant plus de la part d’un canton dont la Constitution spécifie qu’il s’oppose « par tous les moyens aux installations de centrales nucléaires ». La résolution a heureusement été refusée.

Coïncidence ou pas, en cette journée mondiale des abeilles, le Parlement a traité une résolution pour la protection des abeilles. Philippe Poget est revenu sur la nécessité d’envoyer un signal fort au Conseil Fédéral pour qu’il poursuive les efforts entamés mais élargisse l’interdiction d’utilisation à tous les néonicotinoïdes et non pas uniquement aux trois déjà interdits. Ces produits impactent la santé des abeilles et la santé humaine et tous leurs effets néfastes ne sont pas encore démontrés. Il convient alors d’appliquer un principe de précaution pour l’ensemble de cette famille de produits. Un amendement a, en outre, demandé « d’organiser la sortie programmée de l’ensemble des néonicotinoïdes et de renforcer les recherches agronomiques, notamment dans les études d’alternatives aux néonicotinoïdes ». Il est essentiel de sortir le plus rapidement possible des néonicotinoïdes tout en assurant aux agriculteur-trice-s les moyens de le faire. Cet objet va plus loin que la simple protection des abeilles mais va œuvrer pour la protection des insectes, de la biodiversité, pour la sécurité alimentaire et la qualité de notre alimentation.

François Lefort a rappelé que 78% de la flore sauvage et 84% de la flore cultivée sont dépendantes ou en partie dépendantes de la pollinisation. Il ne s’agit donc pas uniquement d’abeilles mais de tout un cycle naturel indispensable mais gravement touché. Ce service naturel rendu par les abeilles a été estimé 155 milliards d’euros en 2017. Certains, pourtant, sont déjà dans un aveu d’échec : des brevets ont été déposés pour remplacer les abeilles par des microrobots. Une solution qui n’a de réalité que dans les productions Netflix.

Sans abeilles, il n’y aura plus d’agriculture. Et le Parlement a heureusement accepté la résolution et son amendement.

Par Sophie Desbiolles, députée