Par Esther Um, membre active du GT Egalité des Verts genevois

Encore un soubresaut dans la politique suisse de l’égalité : le pays apparaît à la 70e place d’un classement mondial sur l’égalité hommes-femmes au niveau de la loi. Le rapport issu de l’étude menée par la Banque mondiale Women, Business and the Law 2019: A Decade of Reform rend compte de la manière dont la loi affecte la vie professionnelle des femmes dans 187 pays. Les résultats sont choquants pour la Suisse, pour le coup, isolée des autres pays occidentaux.

Les principales inégalités portent sur la maternité et les retraites. L’économiste Lynn Mackenzie, qui a commenté cette étude dans une émission de la RTS, note que la Suisse a gagné de justesse un point pour le congé maternité parce que la limite était fixée à 14 semaines. Bien peu par rapport aux autres pays européens. De plus, l’étude lui accorde un point par erreur pour le congé maternité alors qu’il n’est rémunéré qu’à 80% et non à 100%. La Suisse perd surtout des points pour l’absence de congé paternité et parental que la plupart des pays alentours ont déjà instauré. L’analyse de Mackenzie pointe encore des éléments non pris en compte par le rapport lapidaire comme le faible nombre de places en crèche et la cherté des modes de garde en Suisse. Sur le plan des retraites, l’étude considère que l’âge des retraites qui n’est pas égalisé en Suisse ne permettrait pas aux femmes une même période d’épargne. Selon Lynn Mackenzie, le problème ne se situe pas là mais au niveau des rentes de vieillesse : en moyenne, pour 1000.- payés à un homme, une femme reçoit 370.- Cet écart de 63% mérite autant de publicité que l’écart salarial de 19,6%.

Quoi qu’il en soit, ce 70e rang est un paradoxe pour un pays affichant une santé financière qualifiée d’insolente par rapport à la situation des voisins, mais qui est bien derrière ceux-ci en termes d’égalité hommes-femmes. Il y a là de quoi effacer le sourire du visage de ces messieurs annonçant avec fierté des excédents budgétaires année après année. Ce n’est pas un signe de bonne santé que d’être bien adapté à une société profondément malade, disait Krishnamurti. La leçon vaut pour la Suisse en ces temps où se multiplient les sujets de grogne sociale. Mais peut-être prendra-t-on plus au sérieux la colère des femmes si elle est confortée par une étude de la vénérable BM.

En tout cas le rapport est bienvenu en ce mois de mars, mois de la commémoration des luttes pour les droits des femmes, car il rappelle à quel point les discriminations de genre affectent la société et requièrent l’attention de tou-te-s.