Par Nicolas Walder, conseiller national. Ce texte vient d’être publié dans le bulletin d’août 2023 de la Société d’Amitié Suisse-Tibétaine – Section Romande.  

La bonne nouvelle venant du parlement est que les critiques à l’encontre du gouvernement chinois tendent à s’étendre au-delà des voix dénonçant depuis longtemps la répression indicible dont sont victimes les tibétain.e.s. C’est ainsi qu’au sein même des défenseurs de l’économie libérale, des élus haussent désormais le ton pour dénoncer un régime politique chinois qui met en péril autant notre organisation démocratique que le libre marché et le multilatéralisme. 

Et la dureté croissante de la répression chinoise au Tibet et au Turkestan oriental tout comme la reprise en main violente de Hong-Kong et les postures de plus en plus belliqueuses à l’égard de Taïwan sont autant de signes de la fuite en avant des autorités de Pékin qui ne sont pas de nature à nous rassurer. 

C’est aussi une inquiétude toute particulière pour moi de voir la République populaire de Chine, 2èmepuissance mondiale, jouer de plus en plus de son influence au sein de l’ONU et d’organisations internationales afin d’y saper les principes du droit international. Une Chine dont le régime orwellien alloue de plus en plus de moyens à la répression de sa propre population, comme nous l’ont très bien rappelé en détails Kelsang Pawotsang et Fanny Morel tout à l’heure. Et si les juristes débattent aujourd’hui de savoir si l’on peut qualifier les crimes commis au Tibet de génocide, il va sans dire que les violations répétées, graves et massives contre ses habitant.e.s sont autant de crimes contre l’humanité qui doivent être dénoncés sans ambiguïté.

C’est pourquoi, en tant que coprésident du groupe d’amitié Suisse-Tibet au sein du parlement, je n’ai de cesse de dénoncer ces crimes et demander au Conseil fédéral de revoir sa politique qui reste beaucoup trop conciliante avec la Chine. 

Une politique qui consiste aujourd’hui encore à fermer les yeux sur les crimes commis par le gouvernement de Pékin et qui a amené notre pays à signer, en 2013, un accord de libre-échange sans aucun critère en matière de respect des droits humains. C’est ainsi que des biens issus de camps de travail forcé bénéficient de conditions préférentielles en Suisse, ce qui est un véritable scandale. 

Mais heureusement, face aux multiples excès du gouvernement de Pékin, les fronts commencent à bouger au parlement.

Deux rapports demandés par la majorité du Conseil national doivent nous être transmis cet automne. Il s’agit du bilan du dialogue sur les droits humains qui existe depuis 30 ans entre nos deux pays. Un dialogue dont les effets positifs ne sont pour le moins pas évidents ! L’autre rapport doit se pencher sur la sécurité de la diaspora tibétaine en Suisse.  Une majorité du Conseil national a considéré que les activités de surveillance croissante des autorités chinoises en Suisse ainsi que leurs méthodes impliquant de plus en plus ouvertement des intimidations et menaces sont inacceptables. 

Deux autres textes ont été adoptés concernant l’accès au marché chinois et un rapprochement avec le Yuan législatif taiwanais. 

Sans oublier deux motions que j’ai déposées : l’une demandant de suspendre l’accord de libre-échange avec la Chine tant qu’il ne contiendra pas de critères en matière de droits humains. Et l’autre que la Suisse reprenne les sanctions prises par l’UE contre des responsables chinois en raison d’abus des droits humains.

Ces textes participent avec d’autres actions des villes, cantons et société civile, à rappeler que le sort des tibétaines et des tibétains nous concerne directement. Il faut que le Conseil fédéral comprenne enfin que nous ne devons pas continuer de commercer impunément avec un État dictatorial coupable de crimes massifs contre l’humanité.