David Martin

Motion déposée par David Martin en mars 2022

Texte complet: M 2833

Exposé des motifs:

Les parkings souterrains du centre-ville du canton sont en sous-utilisation
et cette tendance se renforce avec la part croissante du télétravail. A l’inverse,
l’espace public est rare et doit répondre à un besoin croissant d’améliorer la
qualité de vie des quartiers, la circulation des transports publics, la mobilité
douce ou encore la végétalisation.

Aujourd’hui, des milliers de places en surface (places gratuites limitées
et illimitées) offrent des tarifs extrêmement avantageux en comparaison aux
parkings souterrains. Selon l’annuaire statistique des transports 2019, ce sont
ainsi 17 721 places gratuites limitées et 366 places gratuites illimitées qui
sont à disposition en ville de Genève. Dans les communes suburbaines, ce
sont 11 510 places gratuites limitées et 1207 places gratuites illimitées.

Le tarif horaire en journée dans les parkings souterrains tourne
généralement autour de 2 francs/heure en journée. La nuit (et le dimanche), le
tarif varie plus sensiblement mais se situe généralement autour de
1 franc/heure. Il est ainsi important de souligner que la tarification varie
considérablement d’un ouvrage souterrain à un autre. Pour les usagères et les
usagers, il est difficile de s’y retrouver et de connaître le prix à payer à
l’avance. Il n’est donc pas étonnant qu’une bonne partie des parkings
souterrains aient un taux de remplissage relativement faible, si par ailleurs,
des possibilités moins chères ou gratuites existent en surface.

Le stationnement en zone bleue est gratuit pour au moins 90 minutes. Le
stationnement en zone bleue est par ailleurs gratuit la nuit. En ce qui
concerne la zone blanche (limitée à 90 minutes, de manière générale, en ville
de Genève), la tarification à l’heure est de 2,80 francs/heure en journée et
gratuite la nuit.

La relative complexité de la tarification en ouvrage, la facilité d’accès aux
places en voirie et la gratuité en zone bleue rendent le stationnement en
surface extrêmement attractif. En effet, ce dernier bénéficie de deux
avantages comparatifs car :

  • il offre l’espoir d’être plus directement accessible (pour autant qu’une
    place soit disponible) et plus proche de la destination en comparaison à un
    stationnement en ouvrage centralisé et enterré ;
  • il offre la possibilité de stationner gratuitement, contrairement au
    stationnement en ouvrage qui est payant, dès la première minute.

Ces deux avantages poussent les conducteurs et conductrices à « tenter »
leur chance pour trouver une place de stationnement en zone bleue. Cela
donne lieu à des comportements où les personnes tournent en rond, jusqu’à
finalement trouver une place « gratuite », renforçant au passage la saturation
du trafic ainsi que les comportements opportunistes où les personnes
déplacent leur véhicule de quelques places à la fin du temps du disque.

De plus, la gratuité de stationnement en zone bleue crée une concurrence
entre automobilistes en visite et automobilistes habitant-e-s au détriment de
ces derniers. En effet comme le nombre de macarons vendus aux habitant-e-s
dépasse parfois le nombre de places bleues disponibles dans les quartiers des
centres urbains (surbooking), la lutte pour la recherche de places à la fois par
les visiteurs et les habitant-e-s provoque souvent d’importantes frustrations !

Or l’utilisation du domaine public représente un coût d’opportunité
extrêmement important, au vu des objectifs climatiques cantonaux,
notamment concernant le secteur de la mobilité. Non seulement le
stationnement en voirie (et sa tarification) contribue à rendre l’utilisation de
la voiture individuelle très attractive, mais il empêche le déploiement de
mesures de mitigation et d’adaptation au changement climatique
(infrastructures de transports publics, cyclistes ou piétonnes, végétalisation de
l’espace urbain, etc.).

Une gratuité du stationnement ne couvre aucunement les coûts directs et
indirects liés à la mise à disposition d’une place de stationnement en voirie. En tenant compte des coûts externes (la pollution, la mise à disposition et
l’entretien de l’infrastructure, les coûts des accidents, etc.), le coût réel d’une
place de stationnement en voirie est estimé à un peu plus de 5 francs par
heure.

Selon le bilan carbone du canton, les émissions de gaz à effet de serre
(GES) liées à la mobilité terrestre sont responsables d’environ 25% des
émissions du canton, dont 95% issues du transport individuel motorisé. Dans
son plan climat cantonal, l’Etat s’est fixé pour objectif une réduction de 40%
à 50% des déplacements en transports individuels motorisés pour 2030 (et
80% d’ici à 2050 !).

Pour ces raisons, la LMCE prévoit – de façon très pertinente compte tenu
de son exiguïté – que dans l’hypercentre (zone I) « le stationnement des
voitures automobiles sur l’espace public est payant » sans exception (LMCE
article 7 alinéa 3 lettre f). Concrètement, cela signifie que la zone bleue
n’existe pas dans ce secteur et, en particulier, qu’il n’est pas possible d’y
stationner gratuitement au moyen du disque.

Au vu de ce qui précède, la présente motion demande au Conseil d’Etat
de supprimer, du moins en journée, le parking gratuit – à savoir la possibilité
d’utiliser le disque dans la zone II LMCE.

Sans présager des modalités de mise en oeuvre que le Conseil d’Etat
choisira pour répondre à la première invite de la motion, il s’agira de rendre
les places bleues de la zone II LMCE payantes pour les visiteurs, par exemple
en généralisant les systèmes de paiement en ligne et le recours au macaron
journalier multizones Tout Public.

Ces nouvelles modalités inciteront les visiteurs à davantage utiliser les
modes de transport alternatifs ou à stationner en souterrain lorsqu’ils viennent
en voiture. Les usagers « habitants » équipés de macaron bénéficieront d’une
concurrence réduite lors de leur recherche de place en zone bleue.