Dilara Bayrak

Motion déposée par Dilara Bayrak en juin 2023

Texte complet: Motion violences domestiques et féminicides – VF

Exposé des motifs:

Reconnus par les Nations Unies comme « la manifestation la plus extrême et brutale de la violence faites aux femmes »[1], les féminicides sont malheureusement bel et bien présents en Suisse.

De par les spécificités liées à la nature de la relation entre les auteurs et les victimes, les cas de violences conjugales et les féminicides requièrent des dispositifs de prise en charge particuliers. Le nombre important de cas et la présence récurrente de certains critères (lien de dépendance, honte de parler de sa situation, peur de ne pas être entendue ou crue, etc.) doivent sonner l’alerte pour nos autorités politiques et être pris en compte pour lutter efficacement contre ce phénomène. Pour y parvenir, la mise en place d’un encadrement qui soit, avant tout, préventif et qui permet d’empêcher l’escalade des situations vers des issues potentiellement fatales est essentielle.

La mise en place de dispositifs ad-hoc pour la prise en charge des victimes de violences conjugales ou de leurs proches permet d’atteindre ce but en redonnant confiance des victimes tout au long de la procédure. Le respect de la confidentialité, de l’écoute et la prise en compte de la situation familiale nécessitent également d’aménager des lieux spécifiques pour la prise en charge des victimes ou de leurs proches.

Bien que l’existence d’un réseau pour la prise en charge des violences domestiques à Genève permette de satisfaire une partie de ces objectifs, les autrices et auteurs de ce texte constatent qu’il est difficile d’évaluer si des moyens supplémentaires doivent lui être apportés. Ainsi, la motion a pour but préalable de demander l’établissement d’un rapport permettant de consulter les acteurs du réseau afin de combler les lacunes et d’établir un bilan.

Pour ce qui est du volet répressif, les cas de violences domestiques sont traités par les polices cantonales. Il leur revient de former leurs agents et agentes à ces cas et de mettre en place des dispositifs d’accueil et de prise en charge adéquats. À Lausanne, la police a instauré une approche novatrice :« Pour éviter des féminicides ou homicides de ce genre, la police est passée d’une vision uniquement répressive à préventive. »[2] À cet égard, le canton de Genève pourrait s’inspirer du dispositif mis en place pour compléter et améliorer le sien, en s’enrichissant de l’expérience lausannoise et internationale.

Par le biais de ce texte, le Conseil d’Etat est également invité à échanger avec le Ministère public, afin d’évaluer l’opportunité de désigner un ou une procureur.e dédié.e aux violences conjugales et aux féminicides, ce qui relaterait l’importance accordée à ces cas et garantirait un traitement adapté et rapide. Le Conseil d’Etat pourrait également échanger avec le pouvoir judiciaire pour compléter la formation des juges en les sensibilisant à la prise en charge de ces cas, avec une attention particulière à des aspects excédant l’approche juridique exclusive.

Enfin, dans les cas les plus tragiques, une meilleure protection et encadrement des proches des victimes est nécessaire, tout particulièrement lorsqu’il s’agit d’enfants mineurs. Le soutien psychologique et institutionnel est d’autant plus important lorsque l’auteur des faits de violence est un membre de la famille.

[1] UNODC, UN Women, CEGS, « Statistical framework for measuring the gender-related killing of women and girls (also referred to as “femicide/feminicide”) », 2022.

[2] Le Temps, « A Lausanne, une approche policière unique en Suisse pour lutter contre les meurtres domestiques », 7.06.2023