Dilara Bayrak

Motion déposée par Dilara Bayrak en octobre 2022

Rapport de commission: M 2877 A

Exposé des motifs:

Dans les années 80, la Suisse a été marquée par les différentes scènes ouvertes de la drogue. Pendant de nombreuses années, les politiques publiques n’ont pas permis de correctement faire face à la problématique, faute d’avoir compris tous les enjeux sociaux, sanitaires et sécuritaires liés aux drogues et à leur consommation. Avec son approche globale, la politique dite des « quatre piliers » a été une réponse efficace et pragmatique à cette question complexe. La mise en place de mesures volontaristes en matière de prévention, de traitement, de réduction des risques, tout en maintenant un volet répressif a permis de rapidement obtenir des résultats concrets. Les risques sanitaires liés à la consommation de drogue ont pu être grandement réduit. Les consommateurs et consommatrices ont pu être pris en charge et accompagné, de manière durable. Les scènes ouvertes de la drogue ont, progressivement, disparu.

Récemment, la problématique de la consommation de drogue est revenue dans l’actualité. De nouvelles habitudes de consommation, notamment concernant le crack, ont remis la problématique à l’agenda politique. Le Groupement Romand d’Etudes des Addictions (GREA), dans un communiqué publié le 6 juillet 2022, relevait le fait que la consommation de cocaïne (dont le crack est issu) n’est, de loin, pas nouvelle en Suisse. « Plus rentable car diluée, la cocaïne consommée sous cette forme est notamment privilégiée par des populations plus précarisées et marginalisées. » Il semble, comme le relevait le GREA dans son communiqué, que la consommation générale de drogue n’ait pas forcément augmenté, mais que de nouvelles formes de consommation soient apparues, touchant notamment une population précarisée. « Pour le GREA, cette tendance signale plutôt une précarisation de la consommation qui se fait davantage dans la rue, et qui est donc plus visible. »

Face à ce constat, il convient de noter qu’une politique basée largement sur la répression n’aura que peu ou pas d’effet sur la consommation. Il s’agit plutôt de chercher à accompagner et à prendre en charge les consommateurs et consommatrices, en tenant compte de leur situation socio-économique et sanitaire. Dans le cas du crack, il s’agit d’une substance hautement addictive : la sensation de manque des consommateurs et des consommatrices est démultipliée. Cela a pour conséquence que l’individu souhaite consommer à nouveau et à une fréquence élevée menant ainsi à l’oubli des besoins de base comme celui de se nourrir. Au vu de ce qui précède, il est évident que la répression pure et dure semble dénuée de succès.

Comme le soulignait le GREA, « la stigmatisation des usagères et usagers de crack, ainsi que la politique de répression pratiquée en chassant les personnes de l’espace public, ne permettent pas d’avancer vers une amélioration de la situation. » Il s’agit, notamment, de faire un accompagnement sanitaire des consommateurs et consommatrices qui ont besoin de soins ou d’aide pour se nourrir ou s’hydrater. Cet accompagnement permet d’éviter des débordements. Or, aujourd’hui, les structures d’accueil disent être débordées par le nombre d’usagers et d’usagères et manquer globalement de places.

Il était également noté que « la problématique est complexe et n’appelle pas à des solutions simples. » C’est, aujourd’hui, que des solutions innovantes et des propositions courageuses doivent être faites pour juguler la problématique. Pour ce faire, il s’agit de redynamiser la politique des « quatre piliers » avec des moyens pour accueillir et accompagner les personnes dans leur consommation et leur situation socio-économique. Il est également nécessaire d’imaginer des dispositifs qui soient à même de répondre aux défis posés par les nouvelles substances et les nouveaux usages de consommation.