Par Céline Bartolomucci, représentante des Vert.e.s genevois.e.s à la Commission consultative de la diversité biologique

J’imagine qu’hormis quelques spécialistes, peu d’entre nous ont entendu parler du Dronte de Maurice. Si je parle du dodo, ce gros oiseau peu farouche qui ne volait pas, à l’allure un peu gauche avec son gros bec recourbé, le nom vous parle sans doute beaucoup plus. Loin d’être un animal fantastique imaginaire, l’animal a bel et bien existé et a été découvert en 1598 sur l’Ile Maurice, son seul habitat. Il est aussi et surtout tristement célèbre pour son extinction, qui a eu lieu moins d’un siècle après sa découverte, avec l’arrivée des premiers explorateurs européens. Comme plusieurs espèces par le passé et comme beaucoup d’autres à venir, sa disparition est connue pour être directement imputable à l’activité humaine.

Petite fille, j’étais comme fascinée par cet animal à l’allure mythique. Existait-il vraiment ? Pourquoi avait-il disparu ? A l’époque, je me tenais évidemment bien loin des questions climatiques et écologiques d’aujourd’hui, mais je m’interrogeais beaucoup sur cette extinction et sur l’impossible retour en arrière qu’elle représentait. Qu’avait-il donc fait pour disparaitre pour toujours cet oiseau ? On ne le croisera donc plus jamais ?

Nous sommes aujourd’hui en 2020 et le dernier Rapport Planète Vivante du WWF vient de sortir. Son analyse est sans appel : la biodiversité de notre planète s’effondre. La taille moyenne des populations de vertébrés (mammifères, oiseaux, reptiles, amphibiens et poissons) a diminué de 68% entre 1970 et 2016, et cela directement à cause de l’être humain et de son expansion toujours plus forte. Tout cela dans l’indifférence (quasi) générale et dans l’oubli, silencieusement et inexorablement…

En Suisse, le peuple a le pouvoir de se prononcer directement sur la manière dont il veut que son pays soit gouverné. La révision de la loi sur la chasse, loin d’être anodine, représente un danger direct pour la biodiversité, déjà à genou, du pays. Des tirs de « précaution » pourront directement viser des animaux censés être protégés à cause de leur effectif rare. Les emblématiques lynx, castors, cygnes, loups et bien d’autres, seront notamment directement visés par ces mesures. Plutôt que leur déclarer la guerre, pourquoi ne pas tenter de vivre en harmonie, dans un monde où chaque espèce aurait sa place ? Et par exemple, en ce qui concerne les animaux de rente, prendre nos responsabilités et organiser une protection des troupeaux améliorée, renforcée et mieux rétribuée ?

Et si la meilleure précaution à prendre n’était pas plutôt de tout faire pour éviter de nous retrouver seuls, entre humains, sur cette planète ? Au rythme actuel des choses, d’ici quelques années, nous parlerons à nos enfants des loups, des lynx et des castors comme du dodo. Des animaux fantastiques disparus et encore visibles sur quelques livres ou exposés tels de poussiéreux trophées sur une cheminée…

Pour éviter ce triste monde, votez NON le 27 septembre à la nouvelle loi sur la chasse.