Par Lynn Bertholet, membre du comité des Vert-e-s genevois-es et candidate au Grand Conseil

Quand Alfred Escher fonda le Crédit Suisse en 1856, il souhaitait créer un établissement mettant à la disposition des entreprises, notamment des chemins de fer, les capitaux nécessaires à leur développement. Faire se rencontrer les dépôts d’une classe moyenne européenne naissante et les besoins d’entrepreneurs suisses innovants, voilà quel était son but et celui de la place financière suisse née dans le sillage du Crédit Suisse.

Cette place financière s’est ensuite complètement dévoyée sous le joug du secret bancaire vendu comme avantage comparatif pour favoriser l’évasion et la fraude fiscales, et dans les lacunes d’une autorégulation systématiquement dictée par ceux à qui elle s’applique.

Affaire de Chiasso et blanchiment d’argent, fonds juifs en déshérence, bulle immobilière des années 1980, fonds Marcos et Abacha, sauvetage de l’UBS en 2008 pour ne citer que les plus grosses atteintes à la réputation de notre pays. Et chaque fois, les autorités publiques à la rescousse. Privatisation des profits et socialisation des pertes et des risques – le tandem infernal de la droite aveuglée par les vertus du marché.

Aujourd’hui, l’affaire du Crédit Suisse nous donne l’opportunité de changer tout cela. Il faut remettre l’église au milieu du village, ou plutôt la place financière suisse au service de ses entreprises et de ses habitants.

Premièrement il est absolument indispensable de canaliser les dépôts vers des investissements réellement durables, et non vers du profit à 3 mois.

Deuxièmement, les risques climatiques et environnementaux doivent être intégrés dans les exigences de fonds propres et de liquidités.

Troisièmement, il faut remplacer l’autorégulation par une autorité de surveillance qui exerce pleinement son pouvoir, à savoir qui ne délègue plus les contrôles à des fiduciaires rémunérées par le client, mais investigue elle-même l’entier des risques des organisations soumises à sa surveillance. L’autorégulation à la sauce helvétique, après ses nombreux échecs, ne convainc plus à l’étranger, et même en Suisse, à part quelques banquiers d’un autre temps.

Quatrièmement, il faut découpler l’activité de banque de dépôt de celle de banque d’affaires et fortement limiter cette dernière .

Enfin, les normes comptables doivent être étendues selon les standards ESG que prépare la Commission européenne afin de tenir compte d’autres dimensions que le seul aspect monétaire pour la taxation.