Par Marjorie de Chastonay, candidate au Conseil d’Etat. Article « L’Invité-e » paru dans la Tribune de Genève le 28 mars 2018

Née en 1975, j’ai sans aucun doute bénéficié des effets de Mai 68 par le biais d’une éducation empreinte de liberté et d’indépendance grâce à une mère féministe, sans toutefois être militante, qui m’a inculqué le courage et la détermination.

De cette période qui a construit la femme que je suis aujourd’hui, j’ai gardé, chevillée au corps, une capacité de regard acéré sur ce qui m’entoure et donc de son corollaire : un sentiment d’indignation permanente.

Je dois sans doute au regretté Stéphane Hessel, ancien diplomate, ambassadeur, résistant et écrivain et à son petit opuscule « Indignez-vous ! » publié en 2010, l’intégration du mot indignation dans mon vocabulaire quotidien.

Oui je suis indignée qu’à Genève, on ne puisse plus se déplacer en vélo ou à pied sans risquer sa vie et que l’on conseille aux personnes âgées et aux enfants en bas âge de rester enfermés lors des pics de pollution, plutôt que d’inciter les voitures à rester au garage.

Oui, je suis indignée que de plus en plus de familles de la classe moyenne n’arrivent pas à terminer le mois sans avoir recours à l’emprunt et sans renoncer à des soins devenus trop coûteux alors que les primes d’assurance maladie ne cessent d’augmenter.

Oui, je suis indignée qu’un-e jeune qui veut prendre son envol ou des parents fraîchement divorcés ne trouvent pas de logements à des prix abordables.

Oui, je suis indignée que les personnes en situation de handicap ne puissent vivre dans des conditions dignes et que notre canton ne dispose toujours pas de suffisamment de structures adaptées à leurs besoins leur permettant d’acquérir une forme d’autonomie.

Oui je suis indignée que les femmes continuent à être moins rémunérées que les hommes, à compétences égales et qu’elles continuent à assurer la majorité des tâches ménagères et éducatives.

Oui, je suis indignée que l’on expulse des familles dont les enfants fréquentent nos écoles au seul motif qu’elles ont déposé leur demande d’asile dans un pays tiers.

Mais, non mes indignations ne se transformeront pas en pavés, ni en prise de position déclamatoire sur le travail du gouvernement actuel ni de ceux qui l’ont précédé. Mon énergie je préfère la garder et transformer mon indignation en engagement. 

Ainsi, si je souhaite ardemment entrer au Conseil d’Etat, c’est pour y apporter mon courage, mes compétences et la force de mon engagement pour une Genève plus verte, plus inclusive et plus égalitaire.

Aucune de mes indignations ne relève de la fatalité, une inversion est possible si, le 15 avril et le 6 mai, au sortir des urnes, se découvre un parlement composé de femmes et d’hommes soucieux du bien commun et avides de solutions consensuelles pour y parvenir et un gouvernement composé lui aussi de femmes et d’hommes – et non pas d’une seule femme comme à ce jour – prêt-e-s à remonter les manches, à sortir de la zone de confort pour proposer des solutions qui visent l’inclusion et non des mesures qui fabriquent l’exclusion.