Par Frédérique Perler, Députée

Parmi les 6 urgences traitées :

– La Loi sur l’instruction publique (LIP) Avec ce projet de loi déposé par le nouveau Conseil d’Etat (le précédent déposé sous l’ère de Charles Beer ayant été retiré), il ne s’agissait pas de refaire l’école mais de réécrire une loi, qui datait de 1940. Cette révision complète de la LIP est le fruit d’un long processus en commission, 32 séances tout de même, avec 145 modifications législatives, parmi lesquelles la mise en conformité avec la nouvelle constitution traitant de la formation obligatoire et individualisée à tous les jeunes jusqu’à 18 ans.

Au chapitre des innovations : l’école inclusive, soit l’intégration de 73 000 élèves qui appartiennent à la même école, et donc à la même loi, avec des besoins différents (handicapés, en difficulté, haut potentiel…). Inscrire l’école inclusive dans la loi constitue un effort consenti par le DIP. Autres nouveautés : la formation des enseignants centrée sur le terrain, une meilleure place accordée aux associations professionnelles dans le cadre de l’orientation professionnelles. La nouvelle LIP répond aux évolutions de la société, du système scolaire, du cadre fédéral (harmonisation), clarifie ce qui relève de la loi ou du règlement d’application.

Pour la minorité (UDC), avoir écrit dans la loi les mesures de l’école sans mesures prévues pour les financer alors que les finances cantonales sont mises à mal ne lui convient pas. La réplique est tout aussi sèche qu’en commission : cette question du financement doit se faire dans le cadre du débat budgétaire et non dans le cadre de cette loi.

Jean-Michel Bugnon (Vert) a salué, comme d’autres, le climat de travail positif et le consensus trouvé au sein de la commission s’agissant de la thématique de l’école, tout en relevant son incompréhension face aux amendements de l’UDC qui font de l’acharnement politique.

En deuxième débat, on retiendra que l’amendement de la minorité visant à ce que les directeurs d’établissements consacrent une partie de leur temps de travail à l’enseignement, pour garder à l’esprit la réalité du terrain (!) a été adopté au vote nominal par 47 oui contre 41 non. Incompréhensible venant de la droite, qui d’ordinaire répugne à mélanger les fonctions… En troisième débat, l’amendement de la gauche visant à abroger cette absurdité sera refusé (47 non contre 42 oui).

Après deux heures de débats, ce projet de loi sera accepté 76 oui 0 non et 12 abstentions.(PL 11470-A rapports de majorité et de minorité).

– Adoption (à l’exception d’EàG), du projet de loi du Conseil d’Etat autorisant un transfert d’actifs entre l’Etat de Genève et les Ports Francs. Par la voix de Sophie Forster Carbonnier, les Verts soutiennent ce projet de loi par pragmatisme : les Ports Francs seront désormais chargés de financer les investissements nécessaires à la rénovation des bâtiments, ce qui déchargera d’autant l’Etat desdits investissements. Le Conseil d’Etat a profité de ce débat pour remercier la présidente Christine Sayegh arrivée au terme de son mandat, et saluer l’arrivée à cette même fonction de notre ancien ministre des finances, David Hiler. (PL 11575-A)

– Loi en matière de chômage (LMC) Emplois de solidarité. Ce projet de loi du Conseil d’Etat vise à se mettre en conformité avec la législation fédérale s’agissant des emplois de solidarité. Le SECO soutient que ces emplois ne sont pas de vrais emplois, mais des mesures du marché du travail (MMT) et donc n’ouvrent aucun droit à des indemnités chômage en cas de licenciement.

Au cœur des débats, la fixation des salaires. Désormais, ils seront fixés par les employeurs et non plus par l’Etat (il les imposera via une directive). Pour la gauche (et les syndicats), fixer les salaires selon le niveau de productivité et de rentabilité dans la loi est choquant, ce n’est qu’une précarisation supplémentaire pour des personnes déjà fragilisées, tout en martelant la nécessité d’offrir des conditions de travail dignes pour ces personnes. C’est le seul amendement de la gauche qui sera accepté (Alternative + MCG + quelques UDC).

Lisa Mazzone (Verte) rappelle le recours au TF encore pendant sur l’interprétation du SECO, et s’interroge sur la précipitation de voter ce projet de loi. Elle dénonce aussi l’hypocrisie qui règne autour des emplois de solidarité, car en travaillant, ces personnes créent de la valeur ajoutée, ces emplois ne sont pas une alternative à l’aide sociale, car certaines doivent solliciter l’aide sociale pour compléter leurs salaires.

Les autres amendements déposés par la gauche avaient plusieurs visées : supprimer de la loi la notion de marché complémentaire (notion politique et non juridique), pour que l’Etat fixe les niveaux de rémunérations conformément aux usages (fin du dumping salarial), pour de vrais emplois avec de vrais salaires qui visent la réinsertion sur le marché de l’emploi et pour empêcher des postes d’emplois de solidarité dans les collectivités publiques. Ils ont tous été balayés.

Au vote final, la gauche refuse le texte (30 non contre 60 oui et 1 abstention). Le projet a été amélioré, mais pas la situation des emplois de solidarité… (PL 11541-A rapports de majorité et de minorité).

– Renvoyé en commission une résolution pour un accueil immédiat des réfugiés venant de Syrie. Depuis 4 ans, les autorités n’arrivent pas à mettre un terme au conflit. La population civile cherche à fuir et trouver refuge en Europe. Il est de notre devoir d’accueillir cette population afin qu’elle puisse tout simplement vi
vre dignement.

Le Grand Conseil a exprimé sa solidarité et son empathie vis-à-vis de cette population civile par des déclarations sobres des groupes et a relevé que Genève doit s’affirmer comme terre d’accueil.

Commentaire du Conseil d’Etat : au fond cette résolution demande au Conseil d’Etat ce qu’il fait déjà ; et de s’interroger : à quand une résolution au Conseil d’Etat qui lui demande de s’engager contre la misère du monde ? Cela ne s’invente pas…

La demande de renvoi à la commission des droits de l’homme venant du PLR pour avoir une réflexion plus profonde ( ! ) a été acceptée par 51 oui 43 non sans abstention….(R 791)

– Accepté une résolution pour la réalisation de logement sur le site de la caserne des Vernets. Elle demande d’organiser rapidement la votation populaire et de continuer à travailler pour la réalisation des logements sur le site de la caserne des Vernets, malgré l’incertitude liée au scrutin populaire.

Il s’agit pour ce parlement de démontrer clairement sa volonté de construire du logement selon les initiants. En fait, c’est une manœuvre électoraliste du PLR… Cette résolution enfonce des portes ouvertes, car il s’agit d’un projet prioritaire du Conseil d’Etat a indiqué Antonio Hodgers, Conseiller d’Etat vert. (R 788)

Parmi les extraits de l’OJ :

– Pris acte des réponses du Conseil d’Etat sur les motions et la pétition refusant les coupes dans le supplément d’intégration de l’aide sociale (CASI). Ces trois réponses (toutes les mêmes), en particulier dans son paragraphe « absence d’effet incitatif » jette le discrédit sur le travail des professionnels de l’action sociale et les efforts des bénéficiaires, en affirmant que l’objectif de ce supplément d’intégration (1/3 du forfait d’entretien soit 300.-), à savoir récompenser l’effort d’insertion, a été dénaturé en raison de la pression exercée par 95 % des usagers pour l’obtenir ! Cela revient à dire que les professionnels ne sont pas assez forts pour résister à d’éventuelles pressions des usagers ! On peut dès lors en déduire que seuls 5 % des bénéficiaires atteint les objectifs du contrat d’aide sociale individuel (CASI). Ce serait alors un constat d’échec cuisant quant à l’application de cette aide au mérite, par ailleurs largement dénoncée par la gauche lors de son introduction en 2006. Curieusement, on apprend ensuite que la diminution appliquée depuis 7 mois, a permis à l’Hospice général une meilleure gestion de l’attribution de ce supplément. Le recul est un peu léger, et on n’y voit pas de cause à effet !

Frédérique Perler (Verte) a fait part de ses doutes quant à ces interprétations. A minima, une réponse sérieuse du Conseil d’Etat aurait été de les documenter.

Hélas, malgré l’insistance de la gauche pour renvoyer ces rapports du Conseil d’Etat en commission des affaires sociales, afin d’avoir des explications un peu plus étayées sur ces points, la majorité du Grand Conseil a pris acte de ces rapports. (M 2217-B, M 2219-B et P 1917-B).

Le Grand conseil a encore : (OJ courant)

– Renvoyé en commission de l’énergie une motion des Verts pour un fonctionnement efficace des installations solaires thermiques (M 2270)

– Refusé une motion UDC demandant de revoir les critères d’attribution des logements subventionnés pour prioriser nos concitoyens. Antonio Hodgers a rappelé avec justesse les dispositions légales en matière d’attribution de logements, afin de couper court aux situations imaginaires évoquées par l’UDC et le MCG tout en les invitant à écrire au département si véritablement ils ont connaissance de pareilles situations. Et vlan !(M 2273)

– Renvoyé en commission des travaux un rapport de commission sur une motion des Verts déposée en 2011, laquelle demande des voies de tram engazonnées. François Lefort (Vert) résume la participation climatique des voies engazonnées, car ce sont de gigantesques climatiseurs en ville. C’est aussi une diminution du bruit et de la pollution en milieu urbain. Outre son constat négatif de la volonté du Conseil d’Etat à avancer sur cet aspect, il mentionne que Genève est une des seules villes au monde dont les voies de tram ne sont pas engazonnées.

Sont évoqués ensuite l’éternelle problématique des véhicules d’urgence, avec les regrets du PLR de n’avoir pu auditionner le SIS, et pour cela il demande le renvoi en commission, juste pour avoir la réponse… Pourtant, ces gros 4×4 semblent conçus pour du tout terrain ; une bande engazonnée ne devrait pas les arrêter. Conclusion : ce qui est possible dans de nombreuses villes européennes devient un épineux problème à Genève.

Genève, un monde en soi ! Quant au ministre des transports Luc Barthassat , il pense qu’il faut soutenir cette motion, c’est que c’est plus joli et cela plaît à certaines personnes, selon ses termes. On n’en saura pas plus… (M 2026-A rapports de majorité et de minorité)

– Après la fin du traitement des urgences, vers 21h 15 environ, le Grand conseil a poursuivi laborieusement le traitement de son ordre du jour. Les séances de 20h 30 à 23h ressemblent plus à un bac à sable qu’à un parlement, et c’est à celui qui alignera le plus de bêtises en bombant le torse. D’autres, consternés, prennent leur mal en patience jusqu’à ce que le président lève la séance (15 min avant l’heure). Il n’y a rien à écrire qui vaille la peine d’être relaté au-delà de 19h… Du reste, les
Verts vont redéposer tout soudain un projet de loi modifiant les horaires de plénières.