Une nouvelle loi sur les déchets, ambitieuse et à protéger
Par Céline Bartolomucci et Yves Meylan pour le Groupe de travail Environnement. Avec l’aide précieuse de Daniel Chambaz
Le 2 septembre 2022 au Grand Conseil, les Vert.e.s retiennent leur souffle : la nouvelle loi sur les déchets est acceptée (après quelques modifications) par 92 « oui » !
En instaurant le tri obligatoire* non seulement pour les ménages mais également pour les entreprises et les entités publiques, la nouvelle loi est ambitieuse et historique. Et pour cause ! Avec ses 4’800’000 tonnes de déchets par an (chiffres 2018), il était grand temps que notre canton se munisse d’un outil à la hauteur des efforts nécessaires pour faire face la crise environnementale que nous vivons tou.te.s aujourd’hui.
Un des premiers objectifs de la loi prévoit une baisse de 25% de nos déchets incinérables d’ici 2025. Pour ce faire, il faut déjà garder en tête que près des 30% du contenu de nos poubelles non recyclées (« sacs noirs ») contiennent des déchets verts ou de cuisine. Ces détritus en grande partie composés d’eau brûlent difficilement et peuvent pourtant être facilement valorisés sous forme de compost ou méthanisation. En un mot : 30% du contenu de nos sacs noirs pourraient déjà éviter l’incinérateur s’ils étaient tout simplement mis au compost. A vos petites poubelles vertes !
Autre mesure phare : dès janvier 2025, le plastique à usage unique sera interdit pour tout ce qui concerne la restauration et les commerces dédiés à l’alimentaire (y compris la petite restauration à l’emporter, issue des food trucks, magasins et autres enseignes de ce type). Si les clients le désirent, il leur sera également possible de laisser les emballages de leurs achats à la caisse de ces magasins (NB: la première mouture de la loi proposait la création d’espaces de tri des emballages afin que les clients puissent laisser les déchets sur place, mais ce point a été supprimé par la majorité du Grand Conseil).
En 2018, le taux de recyclage du canton atteignait les 49,3%. Même si ce taux est plutôt correct, il convient de rappeler que cette proportion signifie quand même une production de 200’000 tonnes de déchets incinérables par an dont 38’000 tonnes de mâchefers, ces résidus issus de l’incinération et aujourd’hui impossibles à valoriser ou à recycler. En effet, l’ordonnance fédérale sur la limitation et l’élimination des déchets (OLED) n’autorise à ce jour qu’une seule filière pour l’élimination des mâchefers actuels, à savoir la décharge de type D. Malgré les efforts déployés dans toute la Suisse ces dernières années, y compris à Genève, il n’est aujourd’hui pas possible d’obtenir une qualité suffisante de sable de mâchefers qui puisse être utiliser directement dans la construction conformément aux directives de l’OLED. Conscient de cette limitation, le canton de Genève, associé à toute la Suisse romande et avec l’appui de diverses organisations suisses, discute en ce moment avec Berne pour modifier l’OLED. L’idée est de pouvoir à terme ajouter le sable dépollué de mâchefers à la liste des déchets utilisables pour la fabrication du béton en accord avec les directives de l’ordonnance fédérale. Une fois cette modification obtenue, une grande partie des mâchefers pourra être valorisée et le besoin en décharge sera ainsi considérablement diminué.
A noter qu’avec cette nouvelle loi, le canton montre son attachement à sa responsabilité en ce qui concerne le traitement de ses propres déchets. Car il n’est pas acceptable que les déchets genevois soient exportés ailleurs, le canton devient ce qu’on appelle « une zone d’apport » pour ses déchets incinérables. Autrement dit, ce type de déchets devra obligatoirement être incinéré à l’usine locale des Cheneviers afin d’éviter tout transport.
L’écriture de cette loi et son adoption a demandé un travail colossal et une détermination à toute épreuve. Même si elle reste évidemment perfectible et a été quelque peu détricotée par le Grand Conseil, nous pouvons nous féliciter de sa future mise en œuvre qui provoquera, nous l’espérons, une prise de conscience et de responsabilités de la part de tous les acteurs.trices et citoyen.ne.s genevois.es.
*Rappel des déchets à trier impérativement : les déchets de cuisine, restes alimentaires et déchets de jardin (biodéchets); le papier et le carton; le verre; l’aluminium; le fer-blanc; les bouteilles de boisson en PET; les déchets spéciaux, notamment les piles et les batteries; les appareils électroniques et électriques, y compris leurs composants.
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