La majorité du Grand Conseil a soutenu en vote final la déclinaison genevoise de la réforme de l’imposition des entreprises (RFFA). Les Verts genevois l’ont rejetée et déplorent le blanc-seing donné par la majorité des député.e.s à un projet hâtif et excessif.

Hâtif, car le volet fédéral de RFFA sera soumis au vote populaire en mai prochain. RFFA n’est autre qu’une pâle copie de la réforme précédente (RIE III), refusée en votation par la quasi-totalité des cantons en février 2017 et par 52% des votant.e.s à Genève. Boucler la réforme fédérale avant d’élaborer sa déclinaison au niveau cantonal tient pourtant de l’évidence : ne mettons pas la charrue avant les bœufs ! Vu le refus genevoise de RIE III, attendre le résultat sur le volet fédéral de la réforme aurait par ailleurs certainement permis de renforcer l’Alternative dans la négociation du taux d’imposition et des contreparties en termes de prestations publiques. Les commissaires Verts ont donc tenté de renvoyer cette réforme en commission, mais n’ont pas été suivis.

Excessif, le projet l’est à tout point de vue. Le taux unique d’imposition des bénéfices, fixé à 13.99%, est nettement trop bas. La diminution des rentrées fiscales cantonales provoquera à coup sûr des coupes dans des secteurs déjà sous-dotés en regard des besoins : le social, la santé, la protection de l’environnement et la mobilité douce. De plus, la dette genevoise, déjà élevée, gonflera en conséquence et alourdira encore ce fardeau dont hériteront les générations futures.

Fixer un taux si bas, c’est faire le pari de la croissance et renforcer la sous-enchère fiscale en poussant les autres cantons à revoir à la baisse leur propre taux d’imposition. A l’échelle internationale, c’est aussi favoriser l’évasion fiscale, aux dépends des populations des pays du Sud qui ne profiteront pas des bénéfices réalisés par les multinationales sur leurs territoires. Les Verts sont évidemment favorables à la fin des statuts fiscaux. La Suisse et Genève ont trop longtemps profité de l’exode fiscal d’entreprises qui ne sont responsables ni sur le plan social, ni sur le plan environnemental.

Les mesures dites compensatoires pour faire avaler la pilule de la réforme sont, de leur côté, trop timorées. La proposition phare du Conseil d’Etat est de développer considérablement le système des subsides aux primes d’assurance maladie, pour un total de 186 millions de F annuels, l’équivalent du coût annoncé de la réforme. Cette proposition est à saluer, mais doit être traitée hors débat sur l’imposition fiscale des entreprises. Le soutien public au paiement des primes maladies, dont a urgemment besoin une part toujours plus importante de la population, ne doit pas être lié à l’acceptation de cadeaux fiscaux aux entreprises ! La création d’un fonds intercommunal pour le développement de l’accueil préscolaire, une autre mesure compensatoire, est bien pensée mais trop faiblement dotée, puisque ce fonds sera alimenté à hauteur de 18 millions de F annuels seulement. Le fonds devrait être au moins doublé et les Verts genevois ont soutenu un amendement dans ce sens, en vain.

Ainsi, en cohérence avec la position des Verts suisses, qui ont lancé et fait aboutir le référendum sur le volet fédéral de la réforme, les Verts genevois s’opposent de manière déterminée à la RFFA genevoise et rappellent la pertinence de l’initiative « Zéro Perte » : il n’y a aucune raison de profiter de cette réforme pour faire un cadeau de 186 millions aux entreprises.