Par Jean-Michel Bugnion, député

Dans cette séance du législatif, tout avait pourtant bien commencé. Notre Lisa fut louée et applaudie de tous bords, abondamment fleurie par les siens, à l’occasion de sa dernière apparition dans cette enceinte. S’ensuivit la prestation de serment de Delphine Klopfenstein qui devient députée et rejoint le groupe des Verts.

En outre, les Verts ont fait passer certains objets: la motion M 2202, pour des tarifs TPG attractifs pour les loisirs en famille, combattue par l’UDC, le PLR, le PDC et Luc Barthassat, et dont le renvoi en commission des transports a été voté par 44 oui (Verts, PS, EàG et MCG) contre 35 non ; la motion M 2173, déposée par Yves de Mattéis, pour une carte qui permet à son détenteur d’attester officiellement son handicap en cas de besoin, a été envoyée en commission des affaires sociales ; la M 2178, dont les Verts furent signataires, intitulée « Cancer du sein de la femme jeune : une priorité de santé publique » a unanimement été adressée au Conseil d’Etat ; la résolution R 765-A dont Boris Calame a déposé le rapport de majorité demandant la transparence sur les négociations TISA a été votée, amendée dans le sens de déclarer le canton de Genève « hors zone TISA », par 60 oui (PS, Verts, EàG et MCG) contre 29 non (PLR, PDC et UDC) et une abstention. Il faut aussi noter le soutien à l’unanimité de tous les partis au PL 11724-A, contre-projet à l’IN 151-D qui concrétise un consensus entre tous les partis politiques et les partenaires sociaux, entraîne le retrait de l’initiative et instaure une inspection du travail paritaire. Enfin le sort du PL 11603-A n’est pas encore réglé : sa demande de concertation entre canton et communes pour la répartition des tâches a été amendée pour que l’exécutif communal soit consulté et qu’il ait l’obligation d’en informer le législatif. Mais le troisième débat n’a pas eu lieu, Mauro Poggia voulant d’abord s’assurer de sa conformité constitutionnelle.

Deux objets vont faire ressurgir les superstitions du vendredi 13 : la « loi Zacharias »  et le « Personal stop ».

Le PL 11408-A modifiant la LDTR « Plus de libertés pour les locataires » avait été ajourné le 27 août dernier. Il revient sur la scène, et en force, c’est le moins qu’on puisse dire. Il reçoit d’ailleurs l’appui du CE qui, par la voix d’Antonio Hodgers, déclare que ce PL s’inscrit dans l’un des axes de la politique du logement, celui qui veut faciliter l’accession à la propriété dans le but d’y habiter. Le scénario désormais classique de la bataille du logement entre gauche (qui défend les locataires) et droite élargie (qui se préoccupe des propriétaires) se rejoue : en commission du logement, la majorité de 10 députés (PLR, PDC, UDC et MCG) prône l’acceptation de ce PL, 5 (PS, Verts et EàG) le refusent. En plénière, ces proportions seront bien sûr respectées : 60 pour l’entrée en matière, 33 contre. Le PDC, par la plume d’Olivier Cerutti, fait accepter un amendement qui plafonne le prix de vente (mais ne fixe pas la durée de ce plafonnement en cas de revente…). In fine, la loi « Zacharias » est acceptée par 61 oui contre 34 non et le PS annonce le futur dépôt d’un référendum.

Le PL 11398-A avait été, lui, ajourné le 5 juin 2015. Son retour correspondra au sommet du blues du vendredi 13. Ce renforcement du frein à l’endettement prévoit en effet de limiter les charges de fonctionnement et de personnel au renchérissement annuel, tant que la dette n’est pas réduite à hauteur de 8-9 milliards. Une petite dérogation est prévue : 1% pour les dépenses de fonctionnement votée à la majorité (51 voix) ou 0,5% pour les charges de personnel, votée à une majorité qualifiée des 2/3 (67 voix). Notre deuxième rapporteuse de minorité, Sophie Forster Carbonnier, démontra en vain que la réduction de la dette allait demander entre 250 et 500 millions par année, selon qu’elle s’étale sur 20 ou 10 ans et, donc, que ces économies entraîneront des coupes drastiques dans les prestations publiques, tout particulièrement dans les secteurs de la santé, du social et de l’enseignement. Jean-Michel Bugnion s’égosilla à dénoncer la dérive néolibérale du projet, Serge Dal Busco rapporta la position négative du CE face à un corset qui ne résout pas le problème, rien n’y fit. Les mensonges éhontés de Cyril Aellen (« la gauche pratique la politique de la peur chère à l’UDC au plan national, nul ne peut savoir à combien se montera l’effort d’économies ») et d’Eric Stauffer (« ce PL est plus avantageux pour la fonction publique que le passage aux 42 heures et la réduction de 5% des effectifs sur 3 ans ») entraîneront l’acceptation finale par 61 oui (PLR, UDC, MCG, PDC) contre 35 non (PS, Verts et EàG).

C’est à ce moment que les premières nouvelles de Paris sont tombées ; alors, tout est devenu si dérisoire, en ce vendredi 13.